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«Il faut réfléchir au statut de la femme kanak»

La présidente de l’Union des femmes citoyennes revient du séminaire organisé à Bora Bora par l’Union des femmes francophones d’Océanie. Une organisation fédératrice qui milite pour la promotion des droits des femmes de toutes ethnies.

  • Les Nouvelles Calédoniennes : L’Union des femmes francophones d’Océanie a vu le jour en 2010. Quelle est sa mission ?

Françoise Caillard : L’Uffo, qui a le soutien de l’Organisation internationale de la francophonie, de la Communauté du Pacifique et de l’Etat, a pour but de promouvoir la condition et les droits des femmes dans la région. Dans un univers très anglophone, elle permet de relayer la parole des associations de femmes francophones de Nouvelle- Calédonie, du Vanuatu, de la Polynésie et de Wallis et Futuna. Nous avons désormais une tribune, une plateforme, un lieu de concertation en dehors d’un cadre institutionnel. Nous pouvons travailler en réseau, échanger nos informations, alerter les institutions régionales et internationales sur la condition féminine ainsi qu’élaborer des outils de communication, de sensibilisation et de formation en langue française pour appuyer nos actions. En nous regroupant, nous sommes beaucoup moins isolées. Notre devise, « L’union fait la force de l’Océanie », sous-tend notre engagement.

  • L’Uffo a organisé son premier séminaire en février à Bora Bora. Quel en était l’objet ?

Le séminaire a permis d’échanger sur la situation de la femme océanienne. Ensemble, nous avons validé la résolution de l’Uffo qui renferme les propositions d’actions à mettre en place dans chaque pays pour améliorer la condition féminine. L’objet de notre rencontre était également de former des représentantes d’associations, dans le but d’élaborer le contrerapport des ONG sur la mise en oeuvre dans leur pays de la Convention pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (Cedef). L’Uffo doit examiner si des progrès ont été réalisés. C’est un énorme chantier qui demande de l’organisation et des compétences. Le rapport sera ensuite remis à l’ONU et traduit également en langue vernaculaire. En tant qu’ONG, notre rôle est d’éclairer sur la condition des femmes en Océanie, de critiquer de façon constructive les points négatifs qui affectent les femmes et de dénoncer les inégalités. Nous nous retrouvons d’ailleurs au Vanuatu en octobre afin de poursuivre la formation sur la rédaction du rapport.

il reste encore beaucoup d’actions à engager pour effacer les inégalités.

  • La situation des femmes était-elle la même dans les pays francophones de la région ou avez-vous constaté des disparités ?

Il y a des thématiques qui concernent la majorité des femmes océaniennes. Leur place dans la société moderne et dans les systèmes coutumiers, leur accès à l’éducation, à la formation, au monde du travail, leur participation à la vie politique. Sans parler des violences qu’elles subissent. Sur ce dernier point, en échangeant avec les femmes présentes au séminaire, j’ai constaté qu’il y a beaucoup de violences faites aux femmes en Polynésie. Une situation qui pourrait s’expliquer, peut-être, par des repères culturels bousculés. A l’inverse, il semblerait qu’à Walliset- Futuna, les violences soient rares, encore faudrait-il faire une étude pour le vérifier.
Quant au Vanuatu, je remarque que ce pays est en avance sur un plan législatif, puisqu’il a promulgué une loi spécifique sur les violences faites aux femmes. Ce qui n’existe pas en Nouvelle- Calédonie.

  • C’est ce que vous aimeriez proposer aux dirigeants ?

Ce serait une avancée pour les femmes du pays. Il est vrai que nous avons en Calédonie un ministère de la Condition féminine et un Observatoire de la parité, qui a été porté en 2003 par le mouvement Femmes kanak du 21e siècle et politiques, regroupant des femmes de toutes ethnies. Pour certaines choses, la Nouvelle-Calédonie a été pionnière. Mais il reste encore beaucoup d’actions à engager pour effacer les inégalités.

  • Dans quels domaines comptez-vous justement poursuivre votre combat ?

Il est essentiel d’engager avec les autorités coutumières et politiques une réflexion profonde sur le statut de la femme kanak. Ce qui passe notamment par la nécessité de mettre en place des mesures législatives qui favoriseront l’accès des femmes à un traitement juridique égalitaire. Pour le moment, l’article 7 de l’accord de Nouméa est un frein compte tenu de la coexistence du droit commun et du droit coutumier. Il faut que les femmes kanak puissent avoir recours à la juridiction de droit commun. C’est une évidence dans la perspective de construire le pays. Tout comme il faut poursuivre le débat sur la place de la femme dans la vie politique. La parité, c’est formidable à condition que les femmes ne soient pas simplement là comme des faire-valoir. J’aimerais entendre plus de voix s’élever pour défendre la condition des femmes.

Propos recueillis par Frédérique de Jode



23/02/2011
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