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L’Australie pas épargnée

Les Nouvelles Calédoniennes. Publié le jeudi 23 février 2012 à 03H00

Des milliers de suppressions d’emplois ont été annoncés ces dernières semaines dans le pays, notamment dans le Victoria. Il semblerait que l’Australie connaisse finalement la crise... La fin d’un eldorado ?
 

Les Australiens pensaient ne jamais la connaître, cette crise dont on parle tout le temps et partout. Ne jamais devoir l’affronter. La crise économique ne pouvait arriver jusqu’à leur île-continent, tant l’économie du pays donne des gages de bonne santé depuis des années : une croissance annuelle supérieure à 3 %, des déficits insignifiants, un taux de chômage contenu juste au-dessus de 5 %. L’Australie se croyait à l’abri, loin des soubresauts qui secouent la vieille Europe et les Etats-Unis. D’ailleurs c’est au moment où les agences financières mondiales de notation ont privé nombre de pays du fameux triple A qu’elles l’ont décerné à l’Australie.

Nuances. Tout irait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes ? Pas tout à fait. Les Australiens, fiers de leur modèle, en étaient persuadés… jusqu’à ces dernières semaines. Derrière la vitrine de cette économie étincelante en effet, des fissures et des disparités se font jour. Comme si l’incroyable boom minier, toutes ces matières premières (charbon, uranium, minerais, diamant, etc.) que l’Australie vend à l’Asie et qui tire la croissance, ne suffisaient plus désormais à masquer les carences des autres branches de l’économie.
Le secteur industriel et manufacturier souffre. Les services également. Ainsi, depuis début 2012, les annonces de suppressions d’emplois et les plans de licenciements se multiplient. Notamment dans le Victoria. La banque ANZ vient d’annoncer 1 000 suppressions de poste pour le pays, dont 600 sur ses sites de Melbourne.
A Geelong, Alcoa, qui traite de l’aluminium, veut réduire ses effectifs de 600 personnes également. Toujours dans la banlieue de Melbourne, l’équipementier  Bosch va se séparer de 380 salariés. L’usine Toyota d’Altona veut en licencier, elle, 380, 240 postes sont ciblés chez Ford, à Geelong. Et l’on ne parle pas des 500 postes que Qantas la compagnie aérienne, va supprimer et des 1 000 supplémentaires qui sont en sursis, à Tullamarine et Avalon à l’ouest de Melbourne, là où est assuré la maintenance des appareils.

Tendance. La liste est longue et non exhaustive. Il ne s’agit pas d’un épiphénomène, mais bien d’une tendance lourde. Contrairement au Queensland, à l’Australie du Sud et à l’Australie Occidentale, le Victoria – mais aussi la Nouvelle-Galles du Sud, où le marché de l’emploi se rétracte également- ne vit pas de son sous-sol. L’Etat ne jouit pas de cette richesse exclusive qui lui garantit des exportations et des millions de dollars sans compter. Les grandes entreprises internationales implantées dans le Victoria doivent faire face à une concurrence mondiale. Or, pour avoir longtemps cru que la crise économique les épargnerait, elles ne se sont pas adaptées à temps. Aujourd’hui, elles prennent de plein fouet la queue de la comète.
C’est ce que tentent d’expliquer les patrons à leurs employés. C’est le cas d’Alan Joyce, le PD-G de Qantas, mais pas seulement. Tous sont confrontés au même dilemme. Pour une entreprise d’import-export, le coût du travail, couplé à un dollar australien qui n’a jamais été aussi élevé, est devenu trop cher en Australie.

Asie. Tous regardent vers l’Asie, où le coût de la main d’œuvre est divisé, comparativement par dix ou vingt parfois.  Qantas veut ainsi délocaliser la maintenance de ses avions en Malaisie ou à Singapour. ANZ regarde vers l’Inde et les Philippines. Heinz pense à la Nouvelle-Zélande pour ses produits alimentaires avant de voir plus loin. Même Telstra, le groupe public de télécommunications, semble prêt à ouvrir une plate-forme en Inde. Une logique à laquelle avait échappé jusque là l’Australie…

Repères

Encore plus flagrant dans le Victoria
Preuve que l’économie australienne s’essouffle, en 2011, le pays n’a « gagné » que 22 000 emplois, contre 344 000 en 2010. Cela ne se répercute pas encore sur le taux de chômage (5,1 % de la population active) vu que l’Australie crée encore plus d’emplois qu’elle n’en perd. Mais la situation pourrait ne pas durer. Dans le Victoria, l’Etat le plus touché par ce ralentissement, 33 000 emplois ont ainsi été « perdus » depuis le mois d’avril 2011, dont 15 000 pour le seul mois de janvier.

La taxe qui gêne
Au-delà de la conjoncture actuelle, la taxe carbone qui entrera en vigueur en juillet prochain inquiète les entreprises. Elles estiment que cette taxe va renchérir le coût du travail et crispé plus encore le marché de l’emploi.

Prospection en Inde
Ted Bailieu, le libéral qui dirige le Victoria, est actuellement en Inde pour une semaine. Un voyage stratégique, au moment où de nombreuses entreprises australiennes prévoient des délocalisations vers l’Asie. Il est accompagné par quelque 200 chefs d’entreprise et représentants du monde des affaires. Il doit se rendre à New Dehli, Bangalore et Mumbai. A défaut de sauver les emplois industriels du Victoria, il entend renforcer avec l’Inde les liens en matière d’éducation. Des dizaines de milliers d’étudiants indiens venant étudier à Melbourne chaque année… ce qui contribue au dynamisme économique de la région.

A Melbourne, Frédéric Suteau



23/02/2012
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