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Les IUT, un peu plus prépas, un peu moins sociaux

 

Des étudiants de l'université Hamline (Minnesota) passent leur examen, dans les années 30 (université Hamline/Wikimedia Commons/CC).

 

 

 

 

 

En trente ans, les effectifs des Instituts universitaires de technologie (IUT) ont plus que doublé, passant de 53 000 en 1980 à plus de 117 000 aujourd'hui. Ces instituts sont hyper-concurrentiels pour certaines filières, comme celle de la communication ; 8 500 dossiers et 60 places dans l'option pub à l'IUT Paris-Descartes, c'est moins qu'à Sciences-Po. De quoi prendre la grosse tête.

Avec près de 15 de moyenne générale en terminale littéraire, Charlotte, 17 ans, a postulé dans tous les plus grands IUT de France, en info-com, un branche très demandée selon les conseillers d'orientation.

Comme des centaines d'élèves, elle est convoquée à l'IUT Robert-Schuman de Strasbourg pour passer un entretien. L'une d'entre eux sort, les larmes aux yeux :

« Il m'a demandé si j'étais vierge ! Sur le coup, j'ai pas compris et j'ai rien répondu ! »

Charlotte, elle, a eu droit à des questions plus traditionnelles, « sur les enjeux environnementaux du nucléaire, après l'accident de Fukushima ».

« Le DUT est une formation qui ne convient pas à tout le monde »

Tous les diplômes universitaires de technologie (DUT) info-com ne sont pas aussi demandés. Avec des milliers de dossiers pour seulement quelques dizaines de places, une centaine au mieux, les IUT d'info-com ont de plus en plus de mal à sélectionner les candidats. « On ne lit pas tout », avoue Guillaume Bordry, directeur de l'IUT de Paris-Descartes. Gisèle Manchevelle, conseillère d'orientation au CIO media-com de Paris :

« La filière info-com est spéciale. Elle a toujours été très demandée, et très sélective. Elle l'est aussi à l'université. »

« Oui, mais à la fac, c'est trop désorganisé, et pas assez encadré », rétorque Julie qui a opté pour un IUT, conseillée par sa sœur qui a fait info-com à la fac de Nice.

« Et en prépa, il y a trop de travail, cela ne me correspondait pas. »

Les IUT sont, à la base, faits pour les étudiantes comme elle. « Des étudiants qui ont besoin d'encadrement, qui ont peur de la fac, et qui veulent pouvoir accéder rapidement au monde du travail », ajoute la conseillère d'orientation :

« Le DUT est une formation qui ne convient pas à tout le monde. »

« Les IUT permettent le contournement des classes prépas »

Charlotte hésitait entre Sciences-Po et un IUT, elle a finalement choisi l'IUT. « La formation y est toute aussi bonne, et plus orientée sur un seul secteur », pense la jeune fille qui est sûre de vouloir travailler dans la com.

« En deux ans, je peux à la fois préparer des concours et avoir un diplôme qui me permettrait de trouver un emploi tout de suite après. »

Les IUT sont désormais accusés d'être une voix de contournement. « On nous accuse de piquer les bons élèves », reconnaît le directeur de Paris-Descartes. Gisèle Manchevelle :

« On peut dire que les IUT, dans cette filière particulièrement, ne remplissent plus vraiment leur rôle parce que les élèves qu'ils prennent ont les capacités pour faire autre chose qu'un IUT, alors que ceux qu'ils devraient prendre se retrouvent à la fac. »

La conseillère d'orientation confirme que de très bons élèves préfèrent désormais aller en IUT plutôt qu'en prépa, alors qu'ils en auraient les capacités.

Bernard Lickel, directeur de l'IUT Robert-Schuman de Strasbourg, admet aussi :

« C'est vrai que dans une certaine mesure, les IUT permettent le contournement des classes prépas. Alors que la première vocation de l'IUT, c'est de proposer une formation courte qui permette l'insertion professionnelle rapide.

Si trop d'étudiants continuent leurs études, on ne remplit plus notre mission initiale. »

« L'IUT est le dernier ascenseur social qui marche »

Avec ses « vacataires de bonne qualité » et son « beau réseau d'anciens », le DUT info-com de Paris fait de la concurrence aux prépas, et aux grandes écoles. « L'IUT est le dernier ascenseur social qui marche, parce que tout le monde peut y rentrer ! » affirme pourtant son directeur.

Jean-François Mazoin, directeur de l'IUT Paul-Sabatier à Toulouse III et président de l'Association des directeurs d'IUT, milite pour que ces établissement restent « sur une logique d'insertion professionnelle ».

Il convient cependant que « certaines filières sont très proches des prépas, alors que ce n'est pas du tout [leur] vocation ». Le directeur de l'IUT de Paris-Descartes :

« Finalement, on est victimes de notre succès. Et plutôt que de nous incriminer, il vaudrait mieux chercher à comprendre pourquoi notre formation a autant de succès, et essayer d'appliquer ces principes à d'autres formations. »

« Une école de communication, c'est minimum 6 000 euros par an »

Si la filière info-com a autant de succès, c'est parce qu'il existe peu d'écoles publiques et gratuites accessibles directement après le bac. La mère de Charlotte confirme.

« Une école de communication, c'est minimum 6 000 euros par an, avec pas plus de garanties de trouver un emploi à la fin. »

Postuler pour un IUT a cependant un coût.

« Il faut compter 300 euros pour aller de Nice à Strasbourg et se présenter à un entretien, et pas moins pour aller passer les examens d'entrée à Bordeaux. »

Le DUT reste tout de même une formation excellente et gratuite, alors pourquoi ne pas créer plus de places ? Guillaume Bordry de Paris-Descartes :

« Pour ne pas mentir aux élèves, le secteur de la communication offre peu de débouchés, cela doit être clair dès le début dans l'esprit de nos élèves. »

Photo : des étudiants de l'université privée Hamline (Minnesota) passent leur examen, dans les années 30 (université Hamline/Wikimedia Commons/CC).



11/07/2011
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