Ils se souviennent de « Charly »
Les Nouvelles Calédoniennes. Publié le jeudi 13 septembre 2012 à 03H00
De sensibilité indépendantiste ou loyaliste, des personnalités politiques et des militants se sont recueillis hier au Mont-Dore devant le cercueil de Charles Pidjot. Le président de l’Union calédonienne doit être inhumé, demain matin, à La Conception.
A la tribu de La Conception, seules les feuilles traversent la route, ce mercredi. Ses habitants sont partis travailler, d’autres sont chez eux plongés dans le deuil. Devant le manguier d’un jardin, une fillette pédale debout sur un vélo trop grand. Tandis qu’une religieuse monte à pied vers l’église, luttant contre un vent malin. « Charly Pidjot, je le connaissais un peu », souffle la dame à la coiffe bleue. « C’est triste ». Ce village du Mont-Dore a perdu un des siens, et le temps s’est presque figé. Depuis l’annonce de la nouvelle, un drapeau Kanaky flambant neuf flotte sur le bord de la chaussée.
Personnalité incontournable du monde politique et de la lutte indépendantiste, « Charly » Pidjot est décédé mardi matin au Vanuatu, sur l’île de Tanna. Fatigué par des soucis de santé, le président de l’Union calédonienne avait choisi de se rendre sur l’archipel voisin, pour se reposer et se faire soigner selon des méthodes traditionnelles. Des complications l’ont emporté. Une mort brutale qui a anéanti sa femme, Yvonne, et ses proches. Henri est lui « descendu » de Pouébo. Une nuit au volant, pour rendre un hommage devant le corps présenté une bonne partie de la journée, hier, à la salle culturelle de la commune.
Préoccupation. « Je suis secoué, on est tous secoués, je n’arrive pas à trouver les mots », explique ce membre de la famille dont les yeux sont cachés par des lunettes noires. « C’est sûr, Charly laissera une trace à l’UC ».
A l’arrivée du véhicule funéraire, vers 10h30, au centre culturel, où les deux drapeaux, tricolore et FLNKS, étaient en berne, de nombreux acteurs politiques se saluaient, en silence. De Aloisio Sako à Louis Kotra Uregei ou Caroline Machoro, de Simon Loueckhote à Pierre Frogier et au maire Eric Gay. Le haut-commissaire Albert Dupuy a aussi tenu à se recueillir près du cercueil de l’ancien électricien à la SLN, signataire de l’accord de Nouméa, parti à 50 ans. « Il va nous manquer » souffle Anthony Lecren, neveu de « Charly » et membre UC du gouvernement. « Il avait cette qualité de lancer les projets. Et il a beaucoup œuvré pour rassembler le monde indépendantiste. » Ce sentiment est partagé par Charles Washetine, du Palika : « réunir toute la famille, c’était sa préoccupation permanente ». Et ce, même si, sur d’autres dossiers, apparaissent « des divergences d’analyses, de stratégie » entre les deux locomotives du FLNKS. « Malgré tout, le Front continue à porter les choses ensemble ».
Stratège. Dans l’intimité de la pénombre, près du défunt, deux tableaux étaient exposés : un portrait de Charles Pidjot, et une photo des deux drapeaux levés en 2010 en présence du Premier ministre François Fillon. « Le geste » de Charles Pidjot salué par le Rump. D’ailleurs, « on pouvait compter sur lui », estime Roch Wamytan, fidèle compagnon de route. « C’était un bon stratège, un fin tacticien ».
Des militants, comme Patrick, se souviennent aussi de son caractère, « jovial, simple, ouvert, mais parfois impulsif, pas toujours facile ! Il avait son tempérament ! » Des portes ont claqué, ici ou à Paris. Néanmoins, « il voulait vraiment bâtir un destin commun, et il voulait du concret » juge Francky, adhérent au Parti travailliste qui a fait le chemin jusqu’au centre culturel pour honorer sa mémoire.
A La Conception, une coutume près de la maison de la mère de « Charly » a marqué le début de la veillée, hier en fin de journée. Militants indépendantistes, proches, ou gens des tribus, arrivent aujourd’hui de toute la Calédonie. Pour rendre un dernier hommage, lors de l’inhumation prévue demain matin au cimetière, chez lui, au Mont-Dore.
Union calédonienne bien entendu, mais aussi RDO, Palika et UPM… Des représentants de toutes les composantes du FLNKS étaient présents pour l’hommage public, au Mont-Dore. Le Rassemblement-Ump, partenaire de l’UC dans l’initiative du lever des drapeaux, avait, en outre, de nombreux cadres et élus dans le groupe. Pierre Frogier et Eric Gay évidemment, mais aussi Georges Naturel, Alexandra Malaval-Cheval, Rusmaeni Sanmohamat, Cynthia Ligeard, ou encore Gil Brial…
En raison de l’inhumation de Charles Pidjot, demain matin, au cimetière de La Conception, la circulation risque d’être fortement perturbée dans ce coin du Mont-Dore, prévient la gendarmerie. Un plan alternatif doit être proposé aujourd’hui, avec le concours de la mairie.
Une délégation indépendantiste originaire de la Polynésie française est attendue pour le dernier hommage lors de la cérémonie d’enterrement. Les noms de Hiro Tefaarere mais aussi de Vito Maamaatuaiahutapu, sont avancés. Plus étonnant, un élu autonomiste de Papeete, autrement dit loyaliste dans le jargon polynésien, effectuerait également le déplacement.
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