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Au secours des langues aborigènes



Les langues vernaculaires australiennes s’éteignent les unes après les autres. Il n’en reste guère plus d’une vingtaine de nos jours, contre plusieurs centaines il y a 200 ans, à l’arrivée des Européens. Une vingtaine de femmes Aborigènes participent, aujourd’hui, à une formation qui leur permettra ensuite d’enseigner ces « langues mortes » dans les écoles.

Lorsque Lorraine Injie était enfant, les membres de son village savaient manier plusieurs langues aborigènes. Aujourd’hui, comme d’autres femmes de sa communauté, elle veut redonner vie à ces dialectes et étudie à l’université afin de transmettre son savoir dans les écoles australiennes.
« Chez moi, une dizaine de langues étaient pratiquées. En parler trois n’avait rien d’extraordinaire », se souvient cette femme aborigène de 48 ans, originaire de la région isolée de Pilbara, dans le nord-ouest de l’Australie.
« Il n’y aurait plus que 50 personnes pouvant parler le banyjima, moins de dix pour le yinhawangka. Comme nous n’avions pas le droit de parler nos langues, elles sont mortes. Cela m’attriste », déclare Lorraine Injie.
Elle participe aujourd’hui à un programme qui forme des professeurs, afin qu’ils enseignent ensuite ces langues autochtones dans les écoles.
Six fois par an, elle quitte le Pilbara et son climat aride pour se rendre à des milliers de kilomètres, à l’université de Sydney. Elle y retrouve d’autres femmes aborigènes qui, comme elle, préparent une maîtrise en langues indigènes, pour ensuite enseigner dans les écoles de leur région.
Injie parle le banyjima et le yinhawangka, pratiquées dans sa famille. Elle n’a appris l’anglais que plus tard, en grandissant.
Avec la politique d’assimilation jusqu’à la fin des années 1960, qui consistait à retirer les enfants aborigènes de leur famille pour les élever dans des institutions européennes, la disparition des langues s’est accélérée.
Les enfants n’avaient souvent pas le droit de s’exprimer dans leur langue maternelle dans les écoles ou les missions religieuses. « Parfois, les parents aborigènes eux-mêmes avaient fini par se convaincre que l’anglais était mieux pour la réussite de leurs enfants », explique Michael Walsh, expert sur les langues indigènes.

Il n’y aurait plus que 50 personnes pouvant parler le banyjima, moins de dix pour le yinhawangka.

A l’université de Sydney, le Centre Koori est le fer de lance du sauvetage des dernières langues indigènes. En Nouvelle-Galles du Sud, l’Etat le plus peuplé, quelque 5 000 enfants apprennent ces idiomes dans les écoles. Des enseignements similaires existent aussi dans les Etats de Victoria et d’Australie du Sud.
Et certaines langues que l’on croyait mortes ont ressuscité grâce à ces initiatives, comme le kaurna, dans le sud, qui n’était plus utilisé depuis les années 1860, indique Robert Amery, linguiste à l’université d’Adelaïde.
A l’aide d’anciens documents, les aborigènes de la région, accompagnés de linguistes, ont redonné vie à cette langue, désormais employée lors de cérémonies. Elle a même été enrichie de mots adaptés à la société moderne, tels que « couches pour bébé », créé avec les mots kaurna « fesses » et « couvrir ».
Mais ce patrimoine est rarement la priorité des quelque 400 000 Aborigènes d’Australie, population la plus défavorisée du pays.
« Une langue peut être ressuscitée. Mais cela dépend de la volonté de la communauté et de la disponibilité des linguistes. Certaines populations ne sont préoccupées que par leur survie. La langue vient bien après », souligne Michael Walsh.
« Nous aurions besoin de programmes fédéraux et nationaux. Il y a d’énormes avantages à développer le bilinguisme chez les enfants. Mais l’Australie est monolingue, de manière obsessionnelle », regrette John Hobson, du Centre Koori



08/11/2010
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