L'heure des comptes
L'heure des comptes
C’est
l’heure du recensement. Du 27 juillet au 22 août, quelque 650 agents, munis
d’un double questionnaire, démarreront leur porte-à-porte dans toute la
Calédonie pour comptabiliser la population. Une opération de grande envergure
qui intégrera cette fois les données ethniques.
Un à un, tout le monde y passera. Du 27 juillet au 22 août,
tous les logements et les habitants de la Calédonie seront recensés, via un
double questionnaire : l’un portant sur les caractéristiques du logement
(type, taille, propriété ou location, matériaux, équipement électro-ménager et
informatique etc.), le second ciblant les informations individuelles (âge,
lieu de naissance, ethnie, niveau de formation, emploi, mode de transport habituel, etc.).
Après les précédentes campagnes en 1989, 1996 et 2004, cette
grande opération est désormais reconduite tous les cinq ans en Calédonie, alors
qu’elle fonctionne par lissage annuel continu en Métropole et dans les DOM.
De compétence Etat, le recensement calédonien s’effectuera
sous l’autorité de l’INSEE, avec les moyens techniques de l’institut
territorial. D’un coût avoisinant les 200 millions de francs, l’opération sera
menée par quelque 600 à 650 agents recenseurs, recrutés spécialement depuis plus
d’un mois, et rémunérés à la tâche, encadrés par une soixantaine de contrôleurs
et une dizaine de superviseurs. « C’est un enjeu important avec un
délai court. Nous calibrons sur une estimation de 250 000 habitants. Nous avons
découpé le territoire en 2 300 districts géographiques. Chaque agent devra
couvrir trois à quatre districts. Il repérera d’abord les logements puis fera
du porte-à-porte. C’est lui qui remplira directement le questionnaire avec
l’intéressé. Sur un mois, il touchera en moyenne l’équivalent d’un SMG »,
précise Patrice Roussel, inspecteur général de l’INSEE et chef de la mission
recensement en Calédonie.
La visite chez les habitants durera environ quinze minutes
pour la feuille de logement, puis dix minutes par adulte, et cinq minutes par
enfant, estime le statisticien.
« Tout ce que l’on recueille
est couvert par le secret. Personne ne pourra être identifié. »
En cas d’absence, un avis de passage sera déposé et l’agent
reviendra une nouvelle fois. « Il y a toujours des gens absents ou d’autres
qui refusent de répondre. Pourtant, il s’agit d’une enquête obligatoire et
d’intérêt général. Mais cela reste infime. Au final, on arrive toujours à voir
à peu près tout le monde », assure Patrice Roussel. Et de souligner
envers les méfiants : « Les données nominatives ne seront pas
saisies. Nous conservons uniquement les adresses des logements. Tout ce que
l’on recueille est couvert par le secret. Personne ne pourra être identifié. »
Par ailleurs, le système reste déclaratif, c’est-à-dire qu’aucune vérification
n’est effectuée a posteriori.
Fin octobre, les premiers grands chiffres tomberont, d’abord
ceux de la population légale des trente-trois communes et des provinces,
fondamentaux puisqu’ils conditionnent le niveau des dotations budgétaires venant
de l’Etat et du territoire. Ils tireront aussi au clair l’ampleur de
l’immigration des dernières années ou encore le nombre de retours de
Calédoniens au pays.
L’épluchage de données socio-économiques plus affinées
demandera plusieurs mois supplémentaires. Toutes ces informations serviront de
base majeure en matière d’aménagement du territoire et de politique de
développement, tant pour les institutions que pour les chefs d’entreprise.
« Santé, éducation, logement, emploi, migrations… Le recensement est une
photo précieuse », appuie Patrice Roussel.
Sylvain Amiotte, Les Nouvelles Calédoniennes (09 juillet 2009).
Avec données ethniques, cette fois
En 2004, suite au veto du président Chirac qui avait crié au
scandale, le dernier recensement n’avait pas intégré les données ethniques. Ce
qui avait provoqué l’appel au boycott de l’Union calédonienne et par là même
jeté la suspicion sur les résultats du comptage. Cette année, ces questions
réapparaissent, suite à « une concertation d’un an entre l’Etat et les
institutions locales », indique Patrice Roussel, chef de l’opération,
sous la formulation suivante : « A quelle(s) communauté(s)
estimez-vous appartenir ? » Chacun pourra ensuite choisir une ou
plusieurs des neuf réponses possibles : Européenne, Indonésienne, Kanak,
Ni-Vanuatu, Tahitienne, Vietnamienne, Wallisienne-Futunienne, Autre asiatique
et Autre (à préciser).
Ce qui signifie que
les métis pourront s’y retrouver, contrairement au recensement de 1996 qui
n’autorisait qu’une seule réponse. Les membres de la communauté kanak pourront
également préciser leur tribu d’appartenance et leurs langues parlées. « Le
terme Kanak a été préféré à celui de Mélanésienne, qui ne donnait pas entière
satisfaction au regard de la formulation de l’accord de Nouméa »,
précise Patrice Roussel.
La donnée communautaire pourra ainsi être croisée avec
toutes les variables des questionnaires : nature du logement, équipement
électro-ménager, type de famille, diplômes et niveau d’études, emploi… Sachant
que beaucoup attendent des statistiques qualitatives par ethnie pour mesurer
notamment, vingt et un ans après les accords de Matignon, la portée du
rééquilibrage envers la communauté mélanésienne.
Dans son avis sur le recensement calédonien, la CNIL (*)
indique cependant que « les informations relatives à la communauté
d’appartenance ne pourront pas être diffusées à un niveau géographique
inférieur à la province ». En clair selon l’Isee : les tableaux
croisés par ethnie ne seront pas détaillés en dessous de l’échelon provincial,
mais le dénombrement des communautés sera malgré tout autorisé et disponible
pour chaque commune.
La CNIL précise enfin que « les informations
relatives à la tribu d’appartenance ne feront l’objet d’aucune diffusion ».
Elles serviront en revanche à calculer pour chaque commune « la
population légale avec double compte », chiffre qui sert à déterminer
le FIP (fonds intercommunal de péréquation). Dans ce cadre, un étudiant Lifou
vivant à Nouméa mais se revendiquant d’une tribu Drehu sera par exemple pris en
compte pour chacune des deux communes.
(*) Commission nationale de l’informatique et des libertés.
249 000
C’est l’estimation par l’Isee du nombre d’habitants en
Nouvelle-Calédonie au 1er janvier 2009. Partant d’une évaluation de 244 410
habitants au 1er janvier 2008, l’institut a ajouté un accroissement naturel de
2 830 personnes (3980 naissances, 1 150 décès en 2008) et un solde migratoire
de 1 760.
Repères
La polémique
En juillet 2003, le recensement est sur le point de
démarrer, avec deux questions sur l’appartenance ethnique des habitants du
Pays. Mais Jacques Chirac, alors en visite en Nouvelle-Calédonie, est
questionné sur ce point lors d’une rencontre avec des jeunes. Et le président
s’offusque : « L’idée de faire cocher une identité ethnique dans un
document officiel est proprement scandaleuse et contraire aux principes de la
République. On ne peut que la condamner et de la manière la plus sévère. C’est
illégal et immoral. » Deux jours plus tard, le recensement est annulé, et
les 550 agents recrutés renvoyés chez eux.
Que faire en cas d’absence ?
« Le recensement est une enquête d’intérêt général
obligatoire à laquelle nul habitant de Nouvelle-Calédonie ne peut se dérober
», précise l’Isee. Mais les agents recenseurs ne seront autorisés à visiter les
logements qu’entre le 27 juillet et le 22 août. Que faire en cas d’absence du
territoire durant cette période ? Il faut prendre contact avec la Mission
recensement de l’Isee, par téléphone (24 29 95), par mail (sur le site
www.isee.nc) ou par courrier (BP 823 — 98845 Nouméa). Le procédé est le même si
vous devez partir en cours de recensement alors que vous n’avez pas encore été
recensé, alors il est possible de prévenir la mission recensement à l’Isee.
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