Les coutumiers prennent le chemin de l’entreprise
Publié le jeudi 25 août 2011 à 03H00.
Les représentants des différents clans ont signé les statuts de l’entreprise mardi, avant de les déposer au registre du commerce, hier.
Les camions et les pelles qui sont en train de transformer le littoral de Dumbéa auront bientôt une concurrence inattendue : celle des propriétaires claniques de cette terre, que des dizaines de machines grattent depuis quatre ans pour y loger un jour 20 000 personnes. Hier matin, les statuts de l’entreprise Kétéveta ont été déposés au greffe du registre du commerce. Cette « société à actions simplifiée » (SAS) regroupe « tous les clans, tous les propriétaires terriens de Dumbéa », explique Max Ouckewen, l’un des nombreux associés de la structure. Elle a pour ambition d’obtenir des marchés publics dans le domaine du bâtiment, au sein de la commune et particulièrement sur les immenses chantiers des Zac Panda et Dumbéa-sur-Mer (6 000 logements, 400 lots industriels sont annoncés d’ici 2020, sur 500 hectares).
Partenaire. Concernant cette zone, où coulent à flots les investissements (38 milliards) et le béton, « on n’est pas là pour s’imposer, on veut simplement notre place », recadre le président de l’entreprise, Rudolph Togna. « Une place, disons, de partenaire privilégié », que les associés de Kétéveta comptent obtenir grâce à la qualité de leurs offres de services.
« Ce n’est pas un nouveau produit, on essaie plutôt de canaliser l’existant », précise Théodore Wamytan, directeur administratif de la SAS. « Certains d’entre nous travaillent déjà à Dumbéa-sur-Mer, et nous avons un carnet d’adresses qui va nous permettre de nous positionner sur beaucoup de services. »
« Ça y est, ils y sont arrivés ? Je ne le savais pas, c’est très bien », réagit l’un des principaux concernés, Vincent Silve, directeur de la Secal, qui lance les appels d’offres (1). « Il y aura de la concurrence, mais c’est certain qu’il y aura aussi des marchés à prendre. »
D’un point de vue juridique, la SAS Kétéveta regroupe quatre GDPL, ainsi qu’une famille issue d’un cinquième « groupement de droit particulier local » (représentée par Charles Watone). Parmi les autres représentants, il y a Vincent Kamoidji (également président de l’aire) et Gabriel Katé. Les cinq structures sont réunies au sein d’une première société, la SCP Tonepraë, qui elle-même possède les actions de la SAS Kétéveta.
Divergences. « Cela signifie “construire ensemble”, en drubéa », précise Théodore Wamytan, directeur administratif et représentant du GDPL Taku. L’homme est bien placé pour apprécier le sens de l’appellation. Si le GDPL Taku (mandaté par Jean-Michel Togna) et le GDPL Waka (mandaté par Eugène Togna) font partie de la nouvelle entreprise, ce n’était pas gagné au départ.
Depuis des années, les membres des deux groupements ont exprimé des vues différentes sur l’avenir de Dumbéa-sur-Mer, bien qu’il s’agisse de deux branches du même clan. En 2004, puis en 2009, deux bois tabou avaient été plantés au Pic-aux-Morts par le GDPL Taku. Ils étaient accompagnés d’une case, « pour éviter que tout ce qui se fait en face de nous [l’aménagement des Zac] marche sur cet endroit ». Bois et cases avaient été détruits par des inconnus.
« Il y avait un travail à faire, il a été fait », rapporte Max Ouckewen. L’idée de créer une telle entreprise a été conseillée par la province Sud en 2009, après une journée de blocage sur les chantiers de Dumbéa-sur-Mer, puis une manifestation du GDPL Waka, qui souhaitait monter dans « le train du développement économique ».
Maintenant que c’est fait, « on se réapproprie l’espace, mais autrement. C’est un juste retour des choses », conclut Théodore Wamytan.
Contact : 75 17 03.
(1) La Société d’équipement de la Nouvelle-Calédonie est une société d’économie mixte, dont le principal actionnaire est l’Etat. L’aménagement de Panda et celui de Dumbéa-sur-Mer lui ont été confiés par la province Sud.
300 millions de francs par an
Entamés en 2008, les travaux des deux Zac du littoral ont avancé au rythme d’environ 1 milliard d’investissements annuels, consenti après des appels d’offres. Cette cadence va se ralentir dorénavant, annonce la direction de la Secal, pour se limiter à quelque 300 millions par an. Le gros rush est terminé, mais les zones à aménager restent nombreuses. Côté Panda, la magnifique zone qui borde la rivière sera entièrement aménagée. Sans doute moins densément que prévu (une modification du plan d’aménagement est en cours).Côté ouest de la Savexpress, l’anse et la pointe Apogoti ne sont pas terminées. Enfin, l’aménagement des squats de Dumbéa (notre édition d’hier) pourrait aussi offrir des marchés potentiels à la nouvelle société.
Marc Baltzer
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