La consommation d’eau s’assèche
Publié le lundi 03 octobre 2011 à 03H00. Les Nouvelles Calédoniennes.
Qu’il s’agisse de piscine ou d’arrosage, la consommation d’eau est en baisse constante depuis dix ans. Exemple à Dumbéa, où elle a chuté de 34 % sur cette période.
Une baisse de 27 % à Nouméa, de 34 % à Dumbéa, de 17 % au Mont-Dore et de 26 % à Païta. La tendance est claire. Au cours des dix dernières années, la consommation d’eau des particuliers et des entreprises a baissé significativement dans le Grand Nouméa. La baisse existe aussi sur le reste du territoire, mais de façon moins marquée. Toutefois, le pays ne consomme pas moins d’eau car il se développe et connaît une croissance démographique. Mais chaque usager est moins dépensier. C’est le constat que fait Alain Carbonel, directeur général de la Calédonienne des Eaux.
Technologie. Ce professionnel n’est pas surpris par cette tendance. La Calédonie la partage avec pratiquement tous les pays développés. En Métropole ou en Allemagne, la baisse a commencé il y a vingt ans.
Les explications de ce phénomène sont multiples. L’une d’elles tient au mode d’habitat. Les familles sont moins nombreuses et il y a moins d’habitants derrière chaque compteur.
Une autre explication est d’ordre technologique. Les lave-linge et les lave-vaisselle modernes consomment moins d’eau que leurs aînés. Même chose pour les WC à double chasse, pour les petits et gros besoins. Dans les équipements collectifs, on trouve de plus en plus de robinets à poussoir ou à capteur photosensible qui coupent très vite l’écoulement.
Mais il y a aussi une évolution des comportements. En Calédonie comme un peu partout dans le monde, on fait plus attention qu’avant à sa consommation. On commence à éviter de laisser couler le robinet pendant le rasage ou le brossage de dents, On évite d’arroser son jardin aux heures les plus chaudes. Deux raisons à cela. D’abord les messages de sensibilisation qui font prendre conscience que l’eau potable n’est pas une ressource inépuisable. Ensuite, et peut-être surtout, l’augmentation des prix du mètre cube.
Tarifs. Une fois n’est pas coutume, les tarifs calédoniens sont en moyenne très en deçà de ceux d’Europe. Mais ils ont fortement augmenté ces dernières années à cause notamment des travaux d’assainissement des eaux usées.
En fait, ce n’est pas tant l’acheminement de l’eau jusqu’au robinet qui coûte cher. C’est surtout sa récupération et son épuration après usage.
Comme la Calédonie est en retard dans ce domaine, les prix du mètre cube sont moins élevés qu’en Europe. Mais plus l’assainissement va progresser, plus ils vont monter… Et plus les consommateurs vont faire attention. Sauf que cette spirale a une limite. « Les économies d’eau peuvent finir par provoquer l’augmentation du prix du mètre cube » prévient Alain Carbonel. « Les opérateurs, qu’ils soient privés ou municipaux, ont des coûts fixes liés à l’entretien du réseau et des équipements d’assainissement. Ces coûts sont les mêmes quelle que soit la consommation individuelle. En cas de forte réduction, il faut donc les répartir sur un volume plus réduit. »
Reste alors la solution, pour les habitants de maisons individuelles, d’accéder à l’autonomie en utilisant les eaux pluviales ou le captage d’une réserve souterraine.
Le choix de l’autonomie
En Nouvelle-Zélande, en Allemagne et en Europe du Nord, de nombreuses maisons individuelles sont alimentées non par un réseau, mais par les eaux de pluie recueillies par la toiture et stockées dans une citerne. Une partie de cette eau est ensuite potabilisée pour l’usage alimentaire, le reste est utilisé presque tel quel. Une solution transposable à la Calédonie ? Pas si simple. « En région tropicale, la température de l’eau stockée en citerne pose vite des problèmes de prolifération bactérienne » prévient Alain Carbonel.« Pas si l’on utilise des cuves enterrées » rétorque Jacky Mermoud, militant écologiste et président de l’association Point Zéro. Sa maison du Mont-Dore est autonome, tant en eau qu’en électricité. Mais les obstacles à surmonter sont nombreux. « Il y a d’abord la peinture du toit qui peut contenir du plomb ou de l’étain et du cadmium, et donc charger l’eau en métaux lourds et toxiques. Il y a des procédés pour s’en débarrasser, mais autant le savoir ou posséder une toiture appropriée. » Il y a ensuite l’eau de pluie elle-même, parfois chargée des particules de la SLN ou de la centrale de Prony. L’eau tombée du ciel est souvent plus polluée que celle sortie du sol. Là encore, il faut veiller attentivement à son traitement avant de la boire ou de l’utiliser en cuisine. Raison pour laquelle en plus de sa collecte d’eau pluviale, Jacky Mermoud a fait un forage jusqu’à une source souterraine traversant son terrain. Une pompe à énergie solaire se charge du captage. Quant aux eaux usées, certaines arrosent les arbres pendant que les plus sales partent dans un système d’épandage.
Le chiffre : 0,5
C’est, en moyenne, le pourcentage d’eau du robinet, donc traitée, chlorée et potable, effectivement utilisée pour la boisson ou la cuisine. Les 99,5 % restants sont destinés à la toilette, aux lessives, à la vaisselle, au nettoyage, à l’arrosage des jardins ou au lavage des voitures. En Allemagne, les doubles réseaux, eau potable et eau propre mais non potable, se développent. On comprend pourquoi.Repère
Loin des Allemands. La consommation domestique des Calédoniens (hors industrie) s’établit aujourd’hui à 240 mètres cubes par an et par compteur. En Métropole, la moyenne est de 110 mètres cubes, c’est-à-dire moins de la moitié. En Allemagne, où la sensibilisation est très forte à la préservation des ressources, la consommation ne dépasse guère 80 mètres cubes. A l’opposé, nos voisins Australiens consomment environ 400 mètres cubes. Et les Américains 450 mètres cubes par foyer. L’Allemagne est devenue un des champions de l’économie, notamment parce que le prix du mètre cube est deux fois et demie plus élevé qu’ici. De nombreuses habitations ont un système de recyclage des « eaux grises », c’est-à-dire provenant des douches, lave-linge et lave-vaisselle, vers les chasses d’eau ou l’arrosage.Textes : Philippe Frédière - Photos Archives LNC
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