Un Pacs par jour
Lun 31 Mai
2010 |15:00, Les Nouvelles Calédoniennes
370 couples ont conclu à ce jour un Pacte civil de solidarité (Pacs) en
seulement un an. Etendu à la Nouvelle-Calédonie le 28 mai 2009, mis en place
quelques jours plus tard, le Pacs connaît un succès qui ne faiblit pas.
« Voilà
vous êtes pacsés ! » Après un petit quart d’heure administratif, de
signatures de documents entre les piles de dossiers, c’est fait. Marie et son
compagnon Kristen, tous deux trentenaires, sont pacsés depuis jeudi, 16h20. Ils
concrétisent ainsi seize ans de vie commune devant leurs deux enfants âgés de 9
et 7 ans. Sans chichi, sans tenue spéciale, en toute simplicité comme ils l’ont
voulu depuis longtemps. « Moderne, rapide, simple. »
Ce
couple est le 369e à avoir choisi un pacte civil de solidarité depuis
l’extension de la loi métropolitaine, le 28 mai 2009. Le premier Pacs avait été
conclu le 17 juin suivant. Cette alternative au mariage était très attendue sur
le Caillou. Et a aussi séduit René et Murielle, vendredi soir, après un an et
demi de vie commune. « C’est une manière d’officialiser la chose, plus
simplement que le mariage. Sans robe, en sortant du boulot. »
Au
regard des chiffres, le Pacs connaît donc un fort engouement qui ne faiblit
pas. Après seulement trois mois de mise en place, 120 couples s’étaient déjà
unis de la sorte. Depuis le début de cette année, les greffiers enregistrent un
Pacs par jour au tribunal. Une bouffée d’oxygène pour ceux qui assurent ces
actes. « C’est sympathique comme activité car il s’agit de démarches
volontaires, confie l’un d’entre eux. Cela nous change un peu des
mandats de dépôt ! C’est une tâche mais cela ne met pas en péril la
juridiction. Un Pacs, ce n’est qu’un quart d’heure par jour. »
C’est chouette, on donne du bonheur !
Le
couple de jeudi ne le sait sans doute pas mais il fait partie des profils types
des pacsés calédoniens. « Ils sont âgés en moyenne de 39 ans, décrit
le greffier. Et vivent en couple depuis plusieurs années, voire plusieurs
dizaines d’années. » 80 % des couples sont composés d’un homme et
d’une femme. « On a enregistré 26 Pacs pour des partenaires féminins,
40 pour des couples d’hommes. Les premiers couples attendaient cela depuis
longtemps. »
En
général, le Pacs est un acte important, souvent d’amour. « Beaucoup
déclaraient au début le faire pour les impôts, commente un autre greffier.
Mais c’est surtout par amour. C’est symbolique. J’ai d’ailleurs eu des gros
Pacs. Avec échanges d’alliances, les amis, la famille, le photographe, le
lancer de riz à la sortie. J’ai eu un autre couple pour qui l’acte faisait
office de fiançailles. C’est chouette, on donne du bonheur ! »
Pour
Marie et Kristen, comme pour d’autres, le Pacs est un premier pas avant le
mariage. Sur les 370, aucun couple n’est encore passé devant le maire. Car un
mariage, comme un décès, annule le pacte civil de solidarité. En un an, trois
Pacs ont été dissous par consentement mutuel.
Catherine Léhé
Vrai ou faux ?
Le Pacs implique des droits et des devoirs similaires à ceux du mariage,
stipulés dans une convention ou à défaut par la loi.
- Les devoirs sont les mêmes que pour le mariage.
Vrai
Les
partenaires qui concluent un Pacs se doivent « une aide matérielle et
une assistance réciproque, notamment en cas de maladie, de chômage ».
Après ou lors de la contraction du pacte, les partenaires peuvent opter pour
deux régimes : soit le régime de la séparation des patrimoines (chacun se
sépare avec ce qu’il possède), soit le régime de l’indivision qui met en commun
tous les biens (hors immobilier) à compter de la conclusion du Pacs.
- Avantageux pour les impôts. Vrai
Le
régime fiscal est identique à celui d’époux liés par les liens du mariage. Car
selon la loi, « les partenaires sont soumis à une imposition commune pour
leurs revenus acquis durant la première année de conclusion du Pacs, ainsi
qu’éventuellement ceux de leurs enfants et autres personnes à charge. »
- On peut hériter grâce au Pacs. Faux sauf…
Le
Pacs n’ouvre aucun droit en matière de succession. Autrement dit, le conjoint
ne peut hériter des biens de l’autre en cas de décès. Car un décès annule
automatiquement le contrat. Pour pouvoir léguer à son conjoint, il faut rédiger
un testament. Dans ces conditions, le partenaire survivant est exonéré des
droits de succession.
En cas de donation, un abattement s’applique sur les droits de mutation : « 9
millions de francs, sur la part du partenaire lié au donateur par un Pacs
depuis au moins deux ans à la date de la donation. Au-delà de ce montant, la
taxation est effectuée selon un barème progressif de 5 à 20 %. »
En
cas de décès, le partenaire survivant peut aussi conserver le domicile commun
pendant un an à compter du décès même s’il est la propriété du défunt. Sauf si
ce dernier en a décidément autrement dans un testament.
- Pour dissoudre le Pacs, il faut aller au
tribunal. Faux
C’est
la différence de taille avec le mariage. Le Pacs permet de se séparer par une
simple lettre. Si les deux partenaires sont d’accord : ils envoient un
courrier au tribunal qui en prend acte. Si un seul des partenaires veut rompre
le contrat, il fait savoir sa décision par un huissier de justice à l’autre.
Une copie de cette lettre est ensuite envoyée par l’huissier au greffe du
tribunal qui a enregistré l’acte. On peut aussi se dépacser par comparution au
tribunal.
- Les personnes de statut civil coutumier peuvent
se pacser. Faux
II
faut qu’au moins l’un des deux partenaires relève du droit commun.
« Le Pacs n’empêche
pas l’homophobie »
L’association
Homosphère s’est battue pendant près de dix ans pour que le Pacs soit étendu au
pays. « C’est une grande victoire autant pour les membres de notre
communauté que pour les gens qui ne sont pas homosexuels », indique
Jean-François Kabar, coprésident de l’association.
Le
dispositif a permis à beaucoup de couples gays d’officialiser leur union, même
s’ils ne constituent pas la majorité des personnes pacsées. Il permet une
protection successorale, à condition qu’un testament soit rédigé. « On
oriente les gens vers deux cabinets juridiques ouverts aux homosexuels car il
n’est pas toujours aisé d’aller chez un avocat ou un notaire sans se sentir
jugé. » Et surtout, le Pacs permet une protection sur le plan du logement.
« Avant, beaucoup étaient jetés à la rue par la famille du compagnon, en
cas de décès de celui-ci. »
Seul
regret pour l’association : « on ne veut pas militer pour le
mariage gay mais nous trouvons dommage de se pacser dans une toute petite salle
qui ne confère pas d’aspect solennel. Or, un Pacs est une reconnaissance de
l’union de deux personnes de même sexe aux yeux de la société », et donc
pas un acte anodin.
« Nous
commençons aussi à avoir des demandes pour l’organisation de soirées de Pacs.
Ce n’est pas notre vocation mais il y a je pense, un créneau à prendre. Nous
pouvons éventuellement prêter notre local. »
Enfin
si la loi évolue, elle le fait plus vite que les mentalités. « On nous a
rapporté des actes d’homophobie au tribunal de la part de gens qui croisent des
couples gays venus se pacser. L’homophobie commence par des mots. Nous allons
veiller à ce que ces actes soient dénoncés. Pour cela, nous encourageons les
personnes à faire une main courante. »
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