Transports : la feuille de route de la province sud
Avec un nombre de voitures qui devrait doubler en dix ans, l’agglomération n’a d’autre choix que de miser gros sur les transports en commun et de repenser l’urbanisation autour de ce critère. La province Sud a adopté hier plusieurs plans qui, en collaboration avec les communes, devraient changer les comportements dans les cinq prochaines années.
La province Sud et les quatre communes
du Grand Nouméa viennent de parfaire le cadre dans lequel doit s’opérer,
au cours des cinq à six prochaines années, le désengorgement de
l’agglomération.
Il y avait eu dans un premier temps la présentation
des grands travaux d’amélioration du réseau routier et la résorption de
ses points noirs, pour un montant estimé à 4,4 milliards CFP.
Il y a
maintenant la confirmation de la volonté de refondre et moderniser
l’ensemble du système de transports en commun, lequel s’imbriquera
étroitement dans une politique d’urbanisme qui se définira à l’échelle
des quatre communes, et intégrera la minimalisation des déplacements
comme une priorité.
Dans dix à quinze ans, la population des quatre communes dépassera les 200 000 habitants.
Hier, les élus de la province Sud ont
approuvé le SCAN
(schéma de cohérence de l’agglomération nouméenne) ainsi que le
PDAN (plan de déplacement de l’agglomération nouméenne). Seul le groupe
Calédonie ensemble s’est abstenu. Il approuvait le plan de
déplacement,mais pas le schéma de cohérence qui devrait aboutir à tirer
un trait définitif sur le projet de deuxième hypermarché à Nouméa
(l’Anse Uaré à Ducos).
C’est en
revanche à l’unanimité que le principe de la création d’une AOT
(Autorité d’organisation des transports) a été adopté.
De tous ces
sigles, il ressort que la province Sud et les communes du Grand Nouméa
veulent se doter d’un système de transport en commun moderne et rapide.
Que les futurs choix d’urbanisme (futures zones résidentielles et
futures zones d’activité) vont mettre en priorité le souci de limiter la
longueur et la durée des déplacements des habitants de l’agglomération
depuis leur domicile jusqu’à leur travail.
Car l’équation est
simple. Dans dix à quinze ans, la population des quatre communes
dépassera les 200 000 habitants. On n’y comptera plus 60
000 voitures, comme aujourd’hui, mais sans doute 110 000.
Conséquence, les grosses améliorations du réseau routier aux entrées de
la capitale n’auront fait que ralentir l’évolution
de la paralysie. Pour la résorber durablement, il faut détourner
une partie de la population de la voiture individuelle et l’attirer vers
le transport en commun. Repenser le mode de vie et d’habitat.
-
Un « tramway sur pneus » en 2015 ou 2016
La colonne vertébrale de l’opération,
c’est le transport en commun en site propre (TCSP). Prenez
un tramway, enlevez ses roues métalliques et remplacez- les par des
pneus. Faites le circuler sur des voies réservées, sans rail, avec
simplement du bitume. Mais pour le reste vous conservez, comme pour un
tramway, le principe des stations où l’on accède de plain-pied (y
compris en fauteuil roulant). Vous lui accordez la priorité aux feux et
aux carrefours.
Inconvénient, c’est plus polluant qu’un engin sur
rails. Avantages : ça coûte trois fois moins cher, ça offre quasiment
les mêmes débits, et c’est plus facile à insérer dans des portions du
réseau routier classique là ou n’existe pas d’alternative. Autre
avantage, des rames de vrai tramway ne pourraient pas être entretenues
en Calédonie, mais devraient partir régulièrement en Métropole ou en
Australie. Ce qui n’est pas le cas des trains-bus.
C’est donc cette
solution intermédiaire, déjà éprouvée dans plusieurs grandes villes, qui
a été arrêtée pour constituer l’artère principale des transports en
commun du Grand Nouméa. Deux lignes partiront de Nouméa-centre : l’une
vers Païta (qui reprendra sans doute le tracé de l’ancienne ligne de
chemin de fer). L’autre vers Boulari. Hors de Nouméa, des réserves
foncières ont été faite pour offrir au TCSP des voies sans circulation.
Dans le coeur de Nouméa, certaines rues deviendront piétonnes. Dans
d’autres, les places de stationnement seront supprimées pour élargir
l’espace de circulation. Au centre, il y aura les voies du TCSP. Sur les
côtés, celles consacrées aux autres véhicules.
Même si c’est moins
coûteux qu’un tramway, l’implantation d’un TCSP est tout de même une
opération lourde. On estime à ce jour le prix des infrastructures (voies
et gares) à une vingtaine de milliards, hors matériel roulant. Autour
de cette double artère à gros débit, il faudra bien sûr réorganiser les
transports en commun actuels. Toute l’efficacité du système dépend de la
capacité des bus classiques à acheminer rapidement et ponctuellement
les usagers depuis leur quartier de résidence jusqu’aux gares TCSP. Puis
de les transporter le cas échéant jusqu’à leur lieu de travail.
-
Un billet unique pour un trajet complet
C’est une autre condition de
l’efficacité d’un système de transport en commun attractif. Le voyageur
doit pouvoir effectuer son trajet domicile travail (ou domicile-collège)
avec un seul titre de transport, quels que soient les véhicules
empruntés. Actuellement c’est impossible. Karuïa dessert Nouméa, Carsud
le Grand-Nouméa, et chacun a sa propre billetterie. D’où le rôle que va
jouer l’AOT (Autorité d’organisation des transports). Il s’agira de
fédérer, voire restructurer les opérateurs existants, et bâtir un
système de billetterie de telle sorte qu’un voyageur puisse aller de
l’Anse Vata à Katiramona avec un seul ticket. Ça se fait ailleurs dans
le monde. C’est donc réalisable.
Le but de l’opération est aussi
d’arriver à une baisse significative du prix des trajets qui incluent
des correspondances. Billet unique ne signifie pour autant pas tarif
unique. Impossible de ne pas tenir compte de la distance effectuée. Ce
qui est recherché, c’est une cohérence tarifaire en fonction de la
distance parcourue, quel que soit le nombre de changements.
Ce
chantier-là n’aura pas la même ampleur financière que le TCSP, mais il
promet d’être bougrement complexe pour mettre au diapason les opérateurs
existants. Et comme, à terme, l’objectif est de baisser les tarifs pour
détourner les habitants de leur voiture, il va falloir trouver des
compléments financiers. En mettant à contribution les entreprises ?
Peut-être. En augmentant les impôts ou taxes ? Sans doute pas, sauf
éventuellement ceux qui concernent le secteur automobile. Vignette, prix
de l’essence, prix du stationnement en ville… les pistes sont
nombreuses qui permettent de faire coup double : pénaliser le transport
individuel et avantager le transport collectif.
-
Des navettes maritimes, mais sans le Betico 1
On
en parle depuis des années comme d’un serpent de mer. Mais les
choses pourraient dorénavant aller vite. Le transport en commun dans le
Grand Nouméa par navette maritime pourrait absorber une partie non
négligeable du trafic actuel, avec des temps de trajet imbattables. Le
gros avantage de cette option est qu’elle ne nécessite que très peu
d’infrastructures. Un quai au Vallon Dore, un autre à Boulari, un à
Magenta, un au centre-ville et un à Païta. Rien à voir financièrement
avec la construction d’une route. Même s’il faut y ajouter quelques
parkings. Même s’il faudra adapter les itinéraires des bus pour
desservir les gares d’embarquement.
Bien sûr, il faudra acheter ou
louer des bateaux. Et si possible plusieurs. Hélas, le Betico 1 qui
croupit dans la rade ne correspond pas à ce type d’activité. Il est trop
gros (50 mètres). Il a une capacité de 300 passagers et n’est pas conçu
pour embarquer et débarquer rapidement des voyageurs urbains. Il faut
des navires plus petits, plus manoeuvrants, où l’on peut entrer et
sortir aisément. À la mode des vaporettos de Venise ou des navettes de
Sydney.
L’option maritime présente un atout de taille, rappelé par
Gil Brial, président de la commission des transports à la province Sud :
compte tenu de la relative légèreté des infrastructures à mettre en
place, elle pourrait se concrétiser très vite. À l’horizon 2012 ou 2013.
Photo D.R
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